. Contes mauve . emets-toi jeune fille, dit la gardienne du Rosier, je ne timposeraiplus désormais ce désespérant spectacle; cest assez dune fois. Je vais maintenantte conduire à ta chambre. Elles repassèrent par le Jardin des Soupirs. Anémone prit congé du vieillardqui ly avait attendue. Elle lui exprima par gestes, le moins gauchement quellepût, la reconnaissance dont débordait son cœur; elle séloigna ensuite, les yeuxbaignés de larmes. A leur tour les loups sapprochèrent du Passeur et lui léchèrentles pieds, puis ils se retirèrent en faisant quatre révérences. La chambre dAnémone était simp


. Contes mauve . emets-toi jeune fille, dit la gardienne du Rosier, je ne timposeraiplus désormais ce désespérant spectacle; cest assez dune fois. Je vais maintenantte conduire à ta chambre. Elles repassèrent par le Jardin des Soupirs. Anémone prit congé du vieillardqui ly avait attendue. Elle lui exprima par gestes, le moins gauchement quellepût, la reconnaissance dont débordait son cœur; elle séloigna ensuite, les yeuxbaignés de larmes. A leur tour les loups sapprochèrent du Passeur et lui léchèrentles pieds, puis ils se retirèrent en faisant quatre révérences. La chambre dAnémone était simple, toute blanche, et si claire que lâme vousriait rien que dy entrer. La première chose que la jeune fille aperçut au mur fut un miroir. Et, commeil y avait cinq ans quelle ne sétait vue, elle le décrocha dune main lapprocha de sa figure, curieuse de se reconnaître. Grand Dieu ! La sueuraux tempes, elle se dévisagea longuement, approchant le miroir, léloignant, XX ■» 1. C EST LA HIDEUSE LUTTE POUR L ORl l32 CONTES MAUVES DE MA MÈRE-GRAND. essuyant dun revers de manche la buée que les larmes lui mettaient aux é divine!... Ainsi donc, cétait elle, bien elle, ce visage amaigri, ce teintrecuit par limpitoyable soleil du Lac des Larmes, ces paupières fatiguées, cettebouche amère, ce front ridé! Ainsi donc, voilà ce que cinq années de servageavaient fait de la radieuse Fille aux Loups !... Plus .le beauté, de grâce, de jeunesse ! Elle seffondra sur le pied de son lit et pleura à grands sanglots : « Flétrie,fanée, vieillie! »... Et à travers sa pauvre tète en déroute tournoyait cette pensée :« II ne taimera Il est impossible quil taime » Elle demeuralongtemps abîmée dans un indicible chagrin. Tout à coup elle se releva, droite, pâle dénergie. Elle prit le miroir, sy regardaune dernière fois avec lenteur, puis dun geste décidé elle le jeta contre le sol. Ilsy brisa en mille pièces qu


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