. L'étang des soeurs-grises . mme laidait, en vernissant le bois et en clouant la bride de cuir;le petit Louis, qui naturellement nallait pas à lécole, travaillaitaussi de son mieux. A douze ans, il ne savait pas ses lettres, maisil dessinait des bonshommes au charbon sur tous les murs, etsculptait de petits dessins de sa façon, avec un couteau, sur lessabots destinés aux paysannes coquettes des environs. Jen ai vude ces dessins, ils sont charmants. Le sabot, ainsi sculpté, se ven-dait trois sous de plus, et, depuis quil produisait ce surcroît debien-être, son père, fort brutal, avait cessé de


. L'étang des soeurs-grises . mme laidait, en vernissant le bois et en clouant la bride de cuir;le petit Louis, qui naturellement nallait pas à lécole, travaillaitaussi de son mieux. A douze ans, il ne savait pas ses lettres, maisil dessinait des bonshommes au charbon sur tous les murs, etsculptait de petits dessins de sa façon, avec un couteau, sur lessabots destinés aux paysannes coquettes des environs. Jen ai vude ces dessins, ils sont charmants. Le sabot, ainsi sculpté, se ven-dait trois sous de plus, et, depuis quil produisait ce surcroît debien-être, son père, fort brutal, avait cessé de le rouer de voisin sintéressa à lartiste enfant, parla au père. Il proposa defaire faire des études au gamin, se chargeant de toute la dépense. — Le père accepta, comme de juste. — Il refusa. — Je voudrais bien savoir pourquoi, par exemple. — Rien de plus simple. — Dabord, dit-il, jai besoin du travailde Louis. Il me rapporte déjà cinquante centimes par jour. Ensuite, LES DEUX SŒURS 121. Jai lhonneur de vous présenter mon ;inii Louis Dei^fronà. je ne sais ni lire, ni écrire, et je ne vois pas pourquoi mon fils onsaurait plus que moi. Mon père était sabotier, je suis sabotier, ilsera sabotier. — Cétait une brute que cet homme-là. Et voilà les gens pourlesquels des cerveaux brûlés réclament droits et font dos révo- l(3me y,,>. 16 123 LÉTANG DES SŒURS-GRISES lutions ! grommela M. Duclerc avec la conviction et lindignationdun millionnaire. — Cest parce que la misère et lignorance font les brutes, quilfaut détruire lignorance et la misère. Mais je poursuis,. Le petitLouis avait tout entendu. Le dimanche suivant, il alla trouver levoisin et lui dit : — Dessinez-moi en grand les lettres de lalphabet. — Quen veux-tu faire? — Jai mon idée. En effet, il sappliqua, dès cet instant, à reproduire ces lettresen relief sur les sabots, avec des enjolivements et des ornementsde sa fantaisie. Chaque lettre devenait ains


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