Maria Chapdelaine : récit du Canada français . annonçait la délivrance, lhiver fini, la terrereparaissant bientôt, les rivières reprenant leurmarche heureuse, le monde métamorphosé unefois de plus comme une belle créature quuncoup de baguette miraculeux délivre enfin dunmalé Mais ils nosaient sen réjouir, danscette maison où pesait la mort, et véritablementils néprouvaient presque aucune joie, parceque leur chagrin était profond et sincève. Ils ouvrirent la fenêtre et sassirent de nou-veau, prêtant loreille au crépitement desgouttes pesantes sur la toiture. Maria vit queson père avait d


Maria Chapdelaine : récit du Canada français . annonçait la délivrance, lhiver fini, la terrereparaissant bientôt, les rivières reprenant leurmarche heureuse, le monde métamorphosé unefois de plus comme une belle créature quuncoup de baguette miraculeux délivre enfin dunmalé Mais ils nosaient sen réjouir, danscette maison où pesait la mort, et véritablementils néprouvaient presque aucune joie, parceque leur chagrin était profond et sincève. Ils ouvrirent la fenêtre et sassirent de nou-veau, prêtant loreille au crépitement desgouttes pesantes sur la toiture. Maria vit queson père avait détourné la tête et restait immo-bile, elle crut que son assoupissement habitueldu soir semparait de lui une fois de plus ; maisau moment où elle allait le réveiller dun mot,ce fut lui qui soupira et se mit à parler. —Ephrem Surprenant a dit la vérité, mère était une bonne femme, Maria, unefemme dépareillée. Maria fit oui de la tête, serrant les lèvres. —Courageuse et de bon conseil, elle la été. Lia mère Chapdelaine — Ta mère était une bonne , une femme dépareillée. (page 222). 224 MARIA C H A P D E L A I N E tant quelle a vécu, mais cest surtout dans lescommencements, juste après notre mariage, etun peu plus tard, quand Esdras et toi vous étiezencore jeunets, quelle sest montrée rare. Lafemme dun petit habitant sattend bien davoirde la misère; mais des femmes qui vont à labesogne aussi capablement et dune si bellehumeur comme elle a fait dans ce temps-là, ilny en a pas beaucoup, Maria. Maria murmura: —Je sais, son père; je sais bien. Et elle sessuya les yeux, car son cœur sefondait. —Quand nous avons pris notre premièreterre à Normandin, nous avions deux vacheset pas gros de pacage, car presque tout ce lot-là était encore en bois debout, et difficile àfaire. Moi jai pris ma hache et puis je lui aidit: Je vas te faire de la terre, Laura! Et dumatin au soir cétait bûche, bûche, sans jamaisr


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