Maria Chapdelaine : récit du Canada français . ne acre,un sortilège impérieux flottait aussi avec la fu-mée et parait de grâces inconcevables, aux yeuxde trois jeunes hommes, une belle fille simpl-^qui regardait à terre. La nuit avançait: les visiteurs sen allèrent:les deux Surprenant dabord, puis Eutrope Ga-gnon, et il ne resta plus que François Paradis,debout, qui semblait hésiter. —Tu couches icitte à soir, François ? de-manda le père Chapdelaine. Sa femme nattendit pas une réponse. —Comme de raison ! fit-elle. Et demain onira tous ramasser des bleuets. Cest la fête desainte Anne. Lorsque,


Maria Chapdelaine : récit du Canada français . ne acre,un sortilège impérieux flottait aussi avec la fu-mée et parait de grâces inconcevables, aux yeuxde trois jeunes hommes, une belle fille simpl-^qui regardait à terre. La nuit avançait: les visiteurs sen allèrent:les deux Surprenant dabord, puis Eutrope Ga-gnon, et il ne resta plus que François Paradis,debout, qui semblait hésiter. —Tu couches icitte à soir, François ? de-manda le père Chapdelaine. Sa femme nattendit pas une réponse. —Comme de raison ! fit-elle. Et demain onira tous ramasser des bleuets. Cest la fête desainte Anne. Lorsque, quelques instants plus tard, Fran-çois monta léchelle avec les garçons, Maria enressentit un plaisir ému. Il lui paraissait veni-: MARIA CHAPDELAINE 83 ainsi un peu plus près delle, et entrer dans lecercle des affections légitimes. Le lendemain fut une journée bleue, une deces journées où le ciel éclatant jette un peu desa couleur claire sur la terre. Le jeune foin, leblé en herbe étaient dun vert infiniment ten-. —Blasphème! Je te ferai bien grouiller, (page 62). dre, émouvant, et même le bois sombre sem-blait se teinter ou peu dazur. François Paradis redescendit léchelle au ma-tin, métamorphosé, en des vêtements propresempruntés à DaBé et à Esdras, et quand il eutfait sa toilette et se fut rasé, la mère Chapde-laine le complimenta sur sa bonne mine. Une fois le déjeuner du matin pris, tous récitèrent ensemble un chapelet à lheure de la 84 M A H I A C H A P D E L A I N E messe, et après cela le long loisir merveilleuxdu dimanche sétendit devant eux. Mais leprogramme de la journée était déjà arrêté.Eutrope Gagnon arriva comme ils finissaientle dîner, qui avait été servi de bonne heure,et aussitôt après ils partirent tous, munis dunemultitude disparate de seaux, de plats et degobelets détain. Les bleuets étaient bien mûrs. Dans les brû-lés, le violet de leurs gi^appes et le vert de leursfeuilles noyaie


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